Jalil Benabdillah : « La transition écologique sera le fil conducteur de nos actions »

Par Juliette JAULERRY

crédit : Boutonnet L - Darnaud A. Région Occitanie.

crédit : Boutonnet L - Darnaud A. Région Occitanie.

Le vice-président en charge de l’économie, l’emploi, l’innovation et la réindustrialisation de La Région Occitanie Jalil Benabdillah donne les premières lignes de sa feuille de route 2022-2028 qui va se concrétiser par un schéma stratégique en cours de rédaction. Soutien de l’emploi, accompagnement de la transition énergétique et financement du haut de bilan feront partie des grands axes des aides régionales à l’entreprise. 

 

« Vous avez la double casquette d’élu et de chef d’entreprise. Comment vivez-vous cette rentrée 2022 ?
Il est vrai que, comme chez la plupart des industriels, mon entreprise SDTech Groupe subit directement les impacts de la crise sanitaire, du conflit ukrainien et de la tension énergétique : difficultés d’approvisionnement, problématiques de transport et logistique, coûts énergétiques qui vont jusqu’à + 100 % d’augmentation en un an alors que nous sommes dans une activité plutôt énergivore. Autre sujet majeur, l’inflation qui pousse aussi les employeurs à revoir les salaires et adapter leurs prix… Alors oui, il y a beaucoup de problématiques difficiles à cerner aujourd’hui, mais c’est le propre du manager d’ajuster ses décisions en fonction du contexte. Chez SDTech, les carnets de commande sont remplis et les chiffres nationaux de croissance restent au rendez-vous. Je suis confiant.

Si l’optimisme caractérise toujours les entrepreneurs, comment les élus de la Région parviennent à maintenir un cap commun pour tous, dans un contexte de si faible visibilité ?
En tant que vice-président à la Région Occitanie je dirais que tout l’enjeu d’une politique économique territoriale réussie est dans le timing : savoir cibler des axes d’action à moyen et long terme mais être capable de décider de nouvelles mesures à très court terme liées au contexte très changeant. Ces schémas stratégiques que nous préparons sont des outils précieux. Le SDREII est plus précisément mon domaine d’action. Le Schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation fixe pour les années à venir les orientations stratégiques régionales en matière d’aides aux entreprises, de soutien à l’internationalisation et d’aides à l’investissement immobilier et à l’innovation des entreprises, ainsi que les orientations relatives à l’attractivité du territoire régional.

Dans ce prochain schéma SDREII, sur quelles nouvelles orientations travaillez-vous ?
Je ne peux pas tout révéler aujourd’hui car nous en sommes à la rédaction après une année de concertation. Mais il est vrai que les problématiques des entreprises ne sont plus du tout les mêmes qu’il y a 6 ans ! On a donc engagé une année de consultations sur tout le territoire pour affiner au mieux notre prochaine stratégie. Le contexte national et international avec aussi l’urgence climatique qui dicte nos conduites : on n’est plus dans le même cadre qu’au moment de la crise sanitaire, par exemple. En 2019-2021, le niveau de trésorerie et le financement des investissements étaient notre focus. Aujourd’hui, les difficultés de recrutement ont pris le dessus.

Sur ce sujet du recrutement, comment le Pacte pour l’embauche prend-il forme ?
Le Pacte pour l’embauche a été lancé en mars dernier avec tout un panel de partenaires et propose une cinquantaine d’outils concrets pour compléter le plan national. Il ne faut plus que des problèmes de logement, de crèche, de mobilités ou autres paramètres externes à l’entreprise soient des freins à l’acceptation d’un poste. C’est notre engagement. Après une première phase de présentation dans tous les départements, des comités de pilotage sont en train de se mettre en place. En travaillant sur le prochain schéma stratégique 2022-28 qui devra être voté en assemblée plénière fin octobre-début novembre, je cherche aussi à présenter une nouvelle philosophie d’accompagnement des entreprises.

Quelle est cette philosophie d’accompagnement qui guidera le prochain SDREII ?
L’orientation est nettement tournée vers l’urgence climatique et la transition énergétique. Une priorité affichée déjà depuis longtemps notamment par la présidente Carole Delga qui d'ici 2050, s'est engagée à ce que l’Occitanie devienne la première région à énergie positive d'Europe. Le plan hydrogène de 150 M€ avec le récent lancement du projet de Technocampus d’ampleur européenne annoncé à Francazal, s’ajoute au Pacte Vert qui, en transversal, soutient les initiatives favorisant la décarbonation : ce sont déjà des mesures très concrètes. On peut aussi citer le plan avion vert abondé de 100 M€ cet été et bien d’autres initiatives dans tous secteurs. Et nous allons aller plus loin. La transition écologique sera le fil conducteur de nos actions. Les critères d’accès à nos aides seront liés aux efforts que les entreprises mèneront sur ce plan.  Bien entendu, les dispositifs d’accompagnement de la transition digitale et managériale déjà existants vont se poursuivre parallèlement. La souveraineté industrielle et l’attractivité de la région guident aussi nos travaux.

Concrètement, comment accompagner les entreprises dans ce virage écologique ?
Je souhaite aller plus loin que l’aide au diagnostic ou aux études. C’est un passage essentiel pour conduire sa transition mais on veut proposer des actions plus concrètes encore pour aider au financement d’actions. Il faut par exemple favoriser les projets ambitieux sur le moyen et long terme avec entre autres, des quasi-fonds propres, c’est-à-dire des prêts avec différés de remboursement de 2 à 5 ans. Cela existe déjà à travers les prêts relances de la Bpifrance. Il faut faciliter le financement des entreprises.

Le spatial présente une forte actualité. La Région va-t-elle intensifier son soutien de cette filière ?
Nous n’avons pas cité toutes les filières d’excellence qui vont du textile à l’agriculture, la viticulture et l’agroalimentaire en passant par la santé mais évidemment aussi l’aéronautique et l’avion vert. Les énergies renouvelables sont aussi dans notre ligne de mire, bien sûr… Mais oui, définitivement le spatial prend de plus en plus de place : les projets d’exploration, les télécommunications, la défense, autant d’enjeux qui se jouent dans la capitale européenne du spatial, Toulouse, qui accueillent des entreprises étrangères du secteur. Nous travaillons sur un grand événement spatial, cela pourrait affirmer la visibilité internationale de Toulouse dans ce secteur. »