Face aux bouleversements climatiques annoncés, la Ville de Toulouse, l’Association Ingénierie Occitanie (AIOc) et le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes d’Occitanie (CROAOC) ont présenté le Livre Blanc « Bâtiment Horizon 2080 ». Ce document de référence évalue la capacité des constructions actuelles à résister aux conditions extrêmes attendues en 2080, et trace les perspectives d’un urbanisme plus résilient.

Il s'agit d'une initiative cruciale pour anticiper les défis futurs et promouvoir la performance environnementale dans le secteur du bâtiment. (Photo Pixabay)
Face aux bouleversements climatiques annoncés, la ville de Toulouse, l’Association Ingénierie Occitanie (AIOc) et le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes d’Occitanie (CROAOC) ont présenté le Livre Blanc « Bâtiment Horizon 2080 ». Ce document de référence évalue la capacité des constructions actuelles à résister aux conditions extrêmes attendues en 2080, et trace les perspectives d’un urbanisme plus résilient.
Une initiative portée par la Ville et ses partenaires du bâtiment
Le 13 mai 2025, un événement symbolique s’est tenu à l’amphithéâtre de l’immeuble Le Belvédère, porté par Jean-Luc Moudenc, maire de Toulouse et président de la Métropole et Marie Unal de Capdenac, présidente de l'AIOc. Il marquait la signature officielle du Livre Blanc « Bâtiment Horizon 2080 : les bâtiments construits aujourd’hui sont-ils adaptés ou adaptables au climat attendu à Toulouse en 2080 ? ».
Fruit d’une collaboration étroite entre la mairie de Toulouse, l’AIOc et le CROAOC, ce travail vise à répondre à un enjeu central pour l’avenir du cadre bâti : l’adéquation des constructions contemporaines avec les futurs climatiques extrêmes que connaîtra le territoire toulousain. Cette réflexion s’ancre dans une démarche plus large de sobriété énergétique, de confort thermique durable et de performance environnementale à long terme.
Un climat toulousain transformé d’ici 2080
Selon les projections météorologiques analysées, les décennies à venir seront marquées par un allongement notable de la saison estivale, conjugué à une diminution progressive de l’hiver. D’ici 2050, les étés pourraient s’allonger de 20 à 30 jours, tendance déjà amorcée et observée dans les relevés de Météo France. Parallèlement, les jours de froid rigoureux deviendront de plus en plus rares.
Les modèles climatiques anticipent une hausse moyenne des températures estivales de +6,8°C par rapport à 2024, avec une augmentation de la fréquence et de l’intensité des épisodes de sécheresse. L’hiver, en revanche, pourrait voir les besoins en chauffage diminuer, mais cette évolution sera contrebalancée par des pics de chaleur estivaux nécessitant des bâtiments plus résilients sur le plan thermique.
Trois groupes scolaires analysés pour mieux comprendre les impacts
Le Livre Blanc repose sur une étude technique approfondie, incluant des analyses de Simulation Thermique Dynamique (STD) menées sur trois groupes scolaires à Toulouse : Jules Géraud Saliège, Émilie du Châtelet et Canto Laouzetto.
Ces établissements ont été choisis en raison de la diversité de leurs conceptions architecturales et techniques, allant de la construction traditionnelle à forte inertie à des approches biosourcées, utilisant des matériaux issus de la biomasse. L’objectif était de comparer les performances thermiques et environnementales de ces deux grands types de construction face aux conditions climatiques extrêmes de 2080.
Les résultats ont permis de constater que deux bâtiments sur trois assurent d’ores et déjà un niveau de confort thermique adapté à cette échéance, moyennant l’élargissement des plages de fonctionnement des systèmes passifs de rafraîchissement (type géocooling). Un troisième établissement nécessiterait une adaptation technique ciblée à l’horizon 2040, sans remise en question globale de sa conception.
Des enseignements techniques pour orienter les futures constructions
Le Livre Blanc apporte des éléments concrets sur les choix constructifs à privilégier. Il souligne la pertinence des structures à forte inertie, notamment pour leur capacité à lisser les pics de chaleur sans recourir massivement à la climatisation. Toutefois, il met aussi en lumière les compromis à considérer, notamment l’impact carbone des matériaux utilisés et la nécessité de réfléchir à un équilibre entre performance thermique, coût de construction et empreinte écologique.
L’étude identifie également plusieurs pistes pour renforcer la qualité bioclimatique des bâtiments : développement de plans masse adaptés, ajustements sur la ventilation naturelle, réduction des surfaces vitrées exposées, mise en œuvre de protections solaires efficaces, ou encore promotion d’îlots de fraîcheur autour des bâtiments.
Un cadre budgétaire maîtrisé malgré la montée en gamme environnementale
Contrairement à certaines idées reçues, le Livre Blanc démontre que les bâtiments publics récents de Toulouse ne coûtent pas plus cher que les précédents. En comparant les ratios de coût au m² et à la classe, il apparaît que les groupes scolaires étudiés affichent à la fois une meilleure performance énergétique et un coût global plus contenu. À titre d’exemple, le coût au m² varie de 1 853 € à 2 204 €, pour des établissements capables d’accueillir entre 27 et 32 élèves par classe, avec des niveaux de performance élevés (E4C1 ou E4C2).
Ce constat valide la stratégie municipale en matière de construction publique, qui combine performance environnementale, maîtrise budgétaire et anticipation des besoins futurs.
Des questions ouvertes pour nourrir les futures réflexions
Si le Livre Blanc répond à de nombreuses interrogations, il soulève également plusieurs pistes de réflexion. Notamment, la question de l’empreinte carbone des bâtiments à forte inertie, la pertinence d’une restructuration par rapport à une reconstruction, ou encore les incertitudes autour du modèle économique de certaines énergies renouvelables comme la géothermie en cas de baisse des subventions.
En filigrane, le document appelle à un renforcement des outils de pilotage et d’évaluation de la qualité environnementale des projets dès leur phase de conception, à travers une meilleure intégration de la STD et des critères bioclimatiques dans les concours d’architecture.
Un engagement collectif autour de la résilience urbaine
L’élaboration du Livre Blanc a mobilisé un large réseau d’acteurs publics et privés. Du côté de la ville de Toulouse, plusieurs directions ont apporté leur expertise, notamment les services de la construction publique et de l’ingénierie environnementale. L’AIOc a coordonné la réflexion technique, avec l’appui de bureaux d’études comme SOCONER, OTCE Midi-Pyrénées, ECOVITALIS ou encore SCOP Ecozimut. Le CROAOC, enfin, a permis de faire dialoguer les pratiques architecturales avec les ambitions de durabilité.
Cette démarche collective ouvre une nouvelle étape dans la fabrique urbaine à Toulouse. En choisissant de regarder loin devant, elle propose une méthode d’action rigoureuse et documentée pour mieux adapter les politiques de construction à l’urgence climatique.