Alpha Impulsion : le futur des lanceurs spatiaux prend forme à Toulouse

Depuis Toulouse, la start-up franco-italienne Alpha Impulsion prépare une innovation de rupture : la première fusée autophage, éco-conçue et à bas coût, prévue pour un lancement en 2025. Avec une levée de fonds en vue et des essais décisifs, l’entreprise ambitionne de redéfinir le marché des petits satellites.

Alpha Impulsion abordera un marché en très forte croissance : on estime qu’au cours de la prochaine décennie, 2500 satellites seront envoyés en orbite chaque année. (Photo Pixabay)

Alpha Impulsion abordera un marché en très forte croissance : on estime qu’au cours de la prochaine décennie, 2500 satellites seront envoyés en orbite chaque année. (Photo Pixabay)

Créée en décembre 2022 à Toulouse par Marius Celette et ses trois associés de l’ISAE-SUPAERO, Alpha Impulsion s’est donné pour mission de transformer le marché européen des lanceurs spatiaux. En s’éloignant des modèles traditionnels, l’entreprise mise sur la propulsion autophage, une technologie où le fuselage de la fusée sert lui-même de carburant. Cette approche réduit de 40 % le poids total du lanceur et divise par cinq ses coûts de production.

« Nous empruntons un chemin radicalement différent, guidé par l’innovation et la compétitivité », explique Marius Celette.

La propulsion autophage, bien qu’imaginée dès les années 1920, n’a jamais été concrétisée jusqu’à présent. Cette innovation associe une propulsion hybride pour garantir une poussée maximale, atteignant jusqu’à 300 kilonewtons dans le cas du futur lanceur Grenat. « À la fin du vol, il ne reste que le moteur-fusée et le satellite, tout le reste a été consumé. C’est une rupture technologique majeure », précise Marius Celette.

Une première mondiale prévue pour 2025

En 2025, Alpha Impulsion testera pour la première fois un prototype de fusée autophage, un projet baptisé Ambre. Ces essais au sol, prévus dans le sud-ouest de la France, précéderont un tir historique sur une base européenne. À terme, l’entreprise vise la commercialisation du lanceur Grenat, capable de placer jusqu’à une tonne en orbite basse (LEO). Lisa Buxton, directrice produit, précise : « Nous serons les pionniers d’un modèle économique accessible et fiable, parfaitement adapté aux besoins des constellations de satellites. »

La technologie autophage permet également de répondre à des besoins croissants de flexibilité pour le lancement de satellites. Contrairement aux gros lanceurs, souvent comparés à des autobus avec des horaires fixes, les micro-lanceurs comme Grenat offrent des services personnalisés, adaptés aux orbites spécifiques des satellites de télécommunication ou d’observation de la Terre.

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En début d’année 2025, la deeptech, implantée en Occitanie et en Italie, s’apprête à procéder à une levée de fonds de 8 M€ pour amorcer sa phase d’industrialisation. (Photo Alpha Impulsion)

Un modèle durable et respectueux de l’environnement

Alpha Impulsion ne se distingue pas seulement par son innovation technologique. En éliminant les éléments inutiles et en adoptant une conception éco-responsable, l’entreprise propose une fusée « zéro déchet », réduisant de 40 % son impact environnemental. « Nous devons conjuguer compétitivité et durabilité pour répondre aux enjeux écologiques du secteur spatial », souligne Martin Gros, directeur scientifique.

La start-up est également signataire de la Charte Zéro Débris, adoptée par l’ESA, qui vise la neutralité des débris spatiaux d’ici 2030. Cette initiative s’inscrit dans un cadre plus large de préservation de l’espace, où chaque composant inutile est éliminé pour éviter la pollution en orbite.

Vers une industrialisation ambitieuse

La start-up prévoit une levée de fonds de huit millions d’euros en 2025 pour soutenir son passage à l’échelle industrielle. Avec un objectif de 52 lancements annuels d’ici une décennie, Alpha Impulsion espère générer 350 millions d’euros de chiffre d’affaires et créer 500 emplois en France et en Italie. « Nous travaillons à structurer une entreprise capable de rivaliser avec les leaders mondiaux », affirme Marius Celette.

Le futur lanceur Grenat affichera des dimensions impressionnantes : 25 mètres de hauteur pour un diamètre d’un mètre, et un poids au décollage de 30 tonnes. Il pourra placer une tonne de charge utile en orbite basse ou 800 kg en orbite héliosynchrone. Ces capacités techniques positionnent Alpha Impulsion comme un acteur clé sur un marché en pleine expansion.

Appuyée par des partenaires tels que le CNES, l’ESA et l’ISAE-SUPAERO, Alpha Impulsion bénéficie également d’une reconnaissance internationale. Elle a intégré des programmes d’accélération prestigieux, comme Takeoff en Italie, et collabore avec des institutions renommées telles que l’Université de Glasgow pour des recherches sur la propulsion autophage.

Le marché spatial connaît une forte croissance, avec des prévisions estimant 2 500 satellites lancés chaque année d’ici 2032. Ce secteur, évalué actuellement à 10 milliards d’euros, pourrait tripler de valeur dans la prochaine décennie. Alpha Impulsion se positionne pour capter cette opportunité, en offrant des solutions à la fois innovantes et compétitives.

« Nous voulons rendre l’espace plus accessible à tous, tout en garantissant une souveraineté européenne dans ce domaine stratégique », conclut Marius Celette.

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