Jean-Louis Alves, Li.mon : « le camion est dévalorisé »

 A la tête de l’entreprise de transport et montage Li.mon (anciennement ITM), Jean Louis Alves dénonce les écarts entre les intentions environnementales des politiques et les moyens mis à disposition des entreprises, aussi engagées soient-elles.  

Jean-Louis Alves, fondateur de Li.mon ( anciennement ITM), société de transport et montage basée à Villeneuve-Tolosane

Jean-Louis Alves, fondateur de Li.mon ( anciennement ITM), société de transport et montage basée à Villeneuve-Tolosane

Depuis quelques mois, une accélération sur le sujet de la RSE se fait sentir dans les discours des pouvoirs publics. Des volontés locales aux annonces nationales sur les ZFE, de la mobilité urbaine à l’écologie possible réelle, de grands écarts économiques et idéologiques surgissent.

Et même si nous avons de la chance sur la métropole de Toulouse, notamment grâce aux RD sur le site de Francazal, d’imaginer de construire mieux et plus vite la mobilité urbaine de demain, nous ne sommes pas prêts.

La RSE c’est quoi ?
La Responsabilité Sociétales des Entreprises à se préoccuper de l’environnement de la vie autour de l’entreprise ; aussi bien sur les plans du salariat et de son bien être dans l’entreprise, que des moyens mis en œuvre pour l’exécution des taches. Historiquement et de façon générale, le « camion » et ce qui l’entoure est dévalorisé. On ne s’y intéresse tellement peu, que l’on s’imagine que l’ensemble des solutions de technologies alternatives sont déjà prêtes à l’emploi et correspondent à la réalité du métier. C’est -hélas- faux.     

On parle de véhicules électriques, au colza, au gaz naturel pour répondre à ces besoins. Mais au regard des outils proposés, notamment sur les véhicules électriques, on s’aperçoit que même si nous le voulons, changer de modèle est très onéreux et difficile.

ZFE difficile à appréhender
La mise en place de la ZFE sur Toulouse au 1 mars 2022, si elle est vertueuse et nécessaire, s’avère difficile à appréhender. Les infrastructures routières, qu’elles soient périphériques ou interurbaines, ainsi que les zones « d’accueil » ne sont pas à ce jour suffisantes. Les bornes de recharges trop peu nombreuses et seulement adaptées aux véhicules de dimensions standard. Il n’y a pas de moyens mis à dispositions pour les professionnels de la route dans et autour de Toulouse, ni aucune autre ville de la région. Si le transporteur ne dispose pas de bornes au sein de ses locaux il ne peut pas répondre à ses propres besoins. Quand on sait qu’il faut aujourd’hui plus de 6 mois, après commande, pour obtenir une borne de 2 prises de recharges et payer la somme de 5500 euros, cela ne facilite pas la décision. Et ce délai et tarif ne s’appliquent que si votre installation est conforme à vos besoins ; si vous devez en plus modifier vos installations électriques, cela devient de l’ordre de l’irréel ou du chemin de croix. A cela il faut ajouter la très faible autonomie proposée actuellement (80km en moyenne).

Stop à l'hyprocrisie !
La Covid a bousculé les codes de la livraison à domicile, augmentant les besoins en services, créant ainsi de la surenchère de propositions commerciales au détriment du simple aspect du bon sens. Si on exclut les livraisons faites en vélo, qui ont au moins le mérite de ne pas augmenter l’empreinte carbone, la question restant posée sur le bien être salarial, comment peut-on croire à un modèle vertueux dès lors que l’on multiplie les exigences commerciales ? Au-delà des solutions techniques à peine émergentes, n’est-il pas souhaitable et profitable pour tous d’éduquer les utilisateurs en servant d’exemple et de ne plus attendre que l’effort soit fait par les autres de manière très hypocrite ? Dans un contexte mondial très incertain, ou à minima la flambée des hydrocarbures nous oblige non pas à nous poser des questions, mais à trouver des réponses, il est urgent de ne plus attendre.

Notre société a entamé la « démarche » électrique en passant commande auprès de Renault, et par l’intermédiaire de Clovis, du tout premier camion 20m3, en juin 2020. Nous l’avons reçu en octobre 2021. La borne de recharge commandée en juillet 2021, n’a été installée qu’en janvier 2022. Nous allons modifier tout notre parc camion, pour l’accès urbain dans les 24 mois qui suivent, mais il est certain que si les pouvoirs publics ne prennent pas en compte les réalités économiques et du métier du moment, très peu d’entre nous pourront suivre le mouvement.

Le premier camion électrique est arrivé en octobre dernier chez Li.mon.

Li.mon met la pédale sur l'électrique
L’ancien livreur Jean-Louis Alves a créé son entreprise Li.mon (anciennement ITM) de livraison et montage de meubles (décoration et électroménager) en 2000.  Conforama, But, Rochebobois, Bo Concept, Darty, et de plus petits commerçants font partie de ses clients. Avec ses 200 salariés et une flotte de 87 véhicules, l’entreprise basée à Villeneuve-Tolosane suit un rythme de croissance soutenue d’environ 30 % chaque année et affiche 10 M€ de CA en 2021. Son premier camion électrique est arrivé en octobre dernier, après 18 mois d’attente. Conçu sur-mesure, ce modèle Renault commandé et loué via Clovis Location-Renault Trucks inspire d’autres entreprises. Malgré un coût élevé (50 % plus cher à la location), le dirigeant veut équiper la moitié de ses camions servant l’agglomération toulousaine (10 véhicules sur 20) dès l’année prochaine. L’optimisation des circuits (déjà une des forces de l’entreprise), la formation (centre interne en cours de création) et le développement en franchise sont ses axes de développement.

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