Près de Toulouse. Plongée au cœur du CEA de Labège, l’accélérateur technologique des entreprises

Installé en Occitanie depuis 2013, le CEA est une plateforme régionale dédiée au transfert technologique. Reportage au sein de leurs locaux de Labège, où le CEA est installé depuis fin 2018.

Maxime Rousseau (directeur du centre Y. Spot) et Cyril Dumet (directeur du CEA Occitanie) au sein du showroom du site de Labège dédié aux entreprises. (Photo : Anthony Assémat - Entreprises Occitanie)

Maxime Rousseau (directeur du centre Y. Spot) et Cyril Dumet (directeur du CEA Occitanie) au sein du showroom du site de Labège dédié aux entreprises. (Photo : Anthony Assémat - Entreprises Occitanie)

Depuis plus de dix ans, l’Occitanie (c’était la région Midi-Pyrénées à l’époque) est dotée d’un CEA (Commissariat à l’énergie atomique), une plateforme régionale dédiée au transfert technologique pour les entreprises du territoire. En France, le CEA regroupe 4500 collaborateurs, dépose 600 brevets par an, soutient un millier de projets de recherche institutionnels et fonctionne avec un budget de 700 millions d’euros annuels (dont 75% est constitué de recettes).

Accompagnement vers l’innovation

En lien direct avec les bases arrières historiques de Grenoble (Isère) et Saclay (Essonne), le CEA régional poursuit deux missions principales : « Diffuser les technologies clés génériques développées au CEA et dont l’accès est souhaité par l’ensemble des secteurs industriels, et développer localement des activités de recherche spécifiques aux tissus industriels régionaux, complémentaires aux installations actuelles ». « Nous accompagnons les PME sur l’innovation technologique et nous les aidons à savoir sur quels projets innover et pour quelle cible. Bref, aider les entreprises à y voir plus clair », explique Maxime Rousseau, responsable du centre d’innovation Y. Spot au sein du CEA occitan.

« On ne veut pas laisser sur le bord de la route une partie de ces entreprises qui ont des difficultés à cerner leurs projets. Nous allons chercher avec eux les briques technologiques. L’objectif est de servir au mieux le tissu économique de nos territoires et les filières industrielles. D’autant que nous sommes capables de répondre quasiment à toutes les filières industrielles ».

Totem, un bâtiment autonome en énergie au coeur du CEA. (Photo : CEA)
Totem, un bâtiment autonome en énergie au coeur du CEA. (Photo : CEA)

Totem, un bâtiment avant-gardiste sur l’autonomie énergétique
Voilà un bâtiment qui porte bien son nom ! Totem (pour « TOTal Energy Management »), espace de démonstration pour les entreprises de 650 m2, se veut une « vitrine technologique » autour de la transition énergétique avec une volonté d’être autonome en énergie. Le tout grâce à un pilotage des usages en temps réel. Autour du bâtiment, ont été construits une ombrière photovoltaïque et un système de recharge des voitures électriques, du stockage d’hydrogène vert et une pile à combustible.

Nouvelle dimension depuis 2018

Fin 2018, le CEA d’Occitanie a pris une nouvelle dimension avec de nouveaux bâtiments ultra modernes à Labège (Haute-Garonne). Quatre bâtiments, des plateformes technologiques, un showroom, des start-up en résidence… En tout, il bénéficie d’une surface de 7000 m2 pour un investissement de 24,4 millions d’euros de la part de la Région Occitanie (plus 4 millions d’euros de la part de l’Etat). Le CEA, organisme à majorité public, intervient dans quatre domaines : la défense et la sécurité, les énergies bas carbone, la recherche technologique pour l’industrie et la recherche fondamentale. Son budget de fonctionnement est de 9 millions d’euros par an.

« Rapprocher le monde de l’entreprise avec la recherche »

Depuis 2021, le site est dirigé par Cyril Dumet. Il explique :

« Nous étions sept au début de l’aventure en 2013. Aujourd’hui, 85 personnes travaillent, 200 en comptant les entreprises hébergées. Notre but est de rapprocher le monde de l’entreprise avec celui de la recherche et d’avoir le même vocabulaire ».

Depuis 2013, plus de 200 projets d’innovation ont été accompagnés et ce sont 20 PME et sept projets qui sont actuellement soutenus par l’organisme de Labège. « Nous anticipons et proposons au bon moment les technologies compatibles, nous apportons des choses différenciantes aux PME, nous adaptons les entreprises aux nouvelles réglementations… Par exemple dans l’électronique de puissance, où d'importantes normes existent », explique Cyril Dumet.

Le CEA possède un site ultra moderne à Labège depuis 2018. (Photo : Anthony Assémat - Entreprises Occitanie)
Le CEA possède un site ultra moderne à Labège depuis 2018. (Photo : Anthony Assémat - Entreprises Occitanie)

Les entreprises accompagnées

Trois entreprises sont partenaires du CEA de Labège : le fabricant de puces électroniques STMicroelectronics, Norimat (qui a mis au point un procédé de frittage flash des poudres pour produire des matériaux à haute performance ) – « ils ont 25 salariés et sont désormais une véritable entreprise, ils vont bientôt quitter le CEA », indique le directeur du CEA – et Plastic Omnium, spécialiste de la mobilité avec lequel le CEA avait signé un partenariat de recherche en novembre 2022.

C’est également le CEA qui accompagne la Snam (recyclage et valorisation de batteries, 21,9 millions d’euros de CA en 2022 et 170 salariés) dans l’Aveyron ainsi qu’une grosse boîte de la région, DIAM Bouchage, basée à Céret dans les Pyrénées-Orientales (à la 60e place du Top Eco 2024 avec 232,6 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022, dont 80% à l’export), qui est le roi du bouchon en liège technologique et qui vend plus de 2,7 milliards de bouchons par an. Le CEA est fortement intervenu sur la partie R&D. « Cette entreprise a su, sur un marché concurrentiel, identifier un facteur différenciant pour se démarquer durablement. Mais c’est un projet qui a mis des années à émerger », détaille Maxime Rousseau. « Nous travaillons aussi, par exemple, avec GTP Bioways en amont des procédés en développement et sur le sujet des inondations dans l’Aude avec Criz’Innov », poursuit Cyril Dumet, qui souhaite « relancer le turn-over régulier des start-up » accompagnées par le CEA.

Les chiffres de l’innovation en Occitanie
- 6,225 : c’est, en milliards d’euros, la somme annuelle dépensée en R&D par les entreprises de la région
- 11 : 11% des chercheurs français sont installés en Occitanie, soit plus de 52 000 personnes
- 450 : 450 millions d'euros : c’est le budget investi dans l’innovation par la Région Occitanie entre 2023 et 2027 (dont 160 millions d’euros de crédits Feder)
- 1053 : en 2020, 1053 brevets avaient été déposés par des entreprises occitanes, ce qui en fait la deuxième région française dans le domaine
(Source : Région Occitanie)
Au coeur de la plateforme CoSy (Contrôle et surveillance des systèmes d'information), qui propose des outils innovants dans la gestion de crise. (Photo : Dumas - CEA)
Au coeur de la plateforme CoSy (Contrôle et surveillance des systèmes d'information), qui propose des outils innovants dans la gestion de crise. (Photo : Dumas - CEA)

Zoom sur le centre d’innovation Y. Spot

Au sein du CEA, Maxime Rousseau dirige le centre d’innovation Y. Spot, l’un des services majeurs du centre.

« Nous accompagnons deux types de boîtes : des PME déjà établies qui ont un fonctionnement identique et des start-up et entreprises en cours de création pour lesquelles il faut agréger des compétences extérieures Y. Spot est une solution pour accompagner les entreprises qui ont envie d’innover mais sur quelque chose de pas encore défini ».

Un atelier de prototypage et un atelier XR, des smartrooms modulables et privatisables et une équipe dédiée sont à la disposition des projets des entreprises. En 2021-2022, 16 PME avaient été accompagnées par ce service.

 

L'électronique de puissance est un secteur qui prend de l'importance au sein du CEA. (Photo : Dumas - CEA)
L'électronique de puissance est un secteur qui prend de l'importance au sein du CEA. (Photo : Dumas - CEA)

NanO’up, qui a vu le jour en janvier 2021, est une autre structure d’accompagnement pour les scale up, les acteurs académiques et industriels de la filière santé. Selon le CEA, « elle propose des compétences, des infrastructures et des équipements orientés vers la montée en maturité de technologies de vectorisation de molécules pour différentes applications thérapeutiques ».

Quant à la plateforme régionale de recherche 3D Camp, elle est dédiée à la fabrication additive par jet de liant depuis 2021.

Des travaux en 2024

En 2024, le site haut-garonnais va connaître des travaux avec l’agrandissement des plateaux technologiques axés sur l’électronique de puissance. Etat et Région financent ces travaux à hauteur de trois millions d’euros. Ce nouvel espace devrait voir le jour en juillet 2024.

Deux autres sites décentralisés en Occitanie
Le CEA en Occitanie n’est pas seulement circonscrit à l’imposant bâtiment du sud-est toulousain. Deux autres antennes sont implantées dans la région. D’abord à Gramat, dans le Lot, qui correspond à la direction des applications militaires. « C’est le centre d’expertise pour l’évaluation des vulnérabilités des systèmes d’armes aux agressions des armes nucléaires et conventionnelles. Ce site constitue un pôle d’excellence en détonique et électromagnétisme », explique le CEA.
L’autre site est situé à Marcoule, dans le Gard. Créé en 1955, il emploie 1500 personnes – dont près de 700 chercheurs - et se définit comme « le premier site industriel de l’académie de Montpellier ».
Ses activités sont centrées sur les sciences et les technologies pour une économie circulaire des énergies bas carbone, avec un focus particulier sur la gestion des déchets et le traitement-recyclage des combustibles.
Enfin, le CEA est partenaire du Village BY CA de Montpellier (Hérault), où il est hébergé pour apporter ses solutions en proximité.

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