Entre guerre économique et transitions industrielles, les CCE décryptent les leviers de compétitivité internationale pour les entreprises d’Occitanie
David Elizalde, président du comité CCE Occitanie. (Photo CEE Occitanie)
Alors que le contexte international demeure incertain, les entreprises d’Occitanie continuent de démontrer leur résilience à l’export. Avec plus de 11,1 milliards d’euros d’exportations au premier trimestre 2025 et un excédent commercial régional de 1,39 milliard, la région confirme sa position de moteur dans le commerce extérieur français. Mais derrière cette dynamique se cache une réalité contrastée : les tensions géopolitiques, les déséquilibres logistiques et les pressions sur les matières premières fragilisent certains secteurs clés. Pour mieux comprendre ces enjeux et identifier les leviers d’action, David Elizalde, président du comité CCE Occitanie a organisé au sein de l'agence Anouk Déqué, à Toulouse, un petit déjeuner presse consacré à la géopolitique mondiale et à ses répercussions locales.
Un contexte international sous tension
« Les entreprises régionales évoluent dans un environnement mondial instable, marqué par des tensions géopolitiques persistantes et une recomposition des chaînes d’approvisionnement », a introduit David Elizalde, président du comité CCE Occitanie. De l’aéronautique à la viticulture, en passant par le numérique, la plupart des filières exportatrices régionales sont exposées à ces aléas internationaux.
L’Occitanie reste toutefois un territoire d’export solide, notamment grâce à son fleuron aéronautique, qui regroupe près de 800 entreprises et 110 000 emplois. « C’est une filière qui continue de croître, même si les tensions sur les composants électroniques et les matières premières pèsent sur la chaîne de production », a-t-il précisé. Les difficultés d’accès à certaines ressources critiques, combinées à la hausse des coûts de transport et aux fluctuations monétaires, rappellent la vulnérabilité d’un modèle encore très dépendant des échanges mondiaux.
La viticulture illustre également cette fragilité. Première région agricole de France, l’Occitanie fait face à une baisse de 17 % de sa production par rapport à la moyenne décennale, aggravée par les aléas climatiques et la contraction de certains marchés internationaux. « Les exportations vers des pays historiquement porteurs, comme les États-Unis ou le Royaume-Uni, se complexifient avec les évolutions réglementaires et douanières », a noté David Elizalde.
Le tourisme, autre pilier économique régional, enregistre quant à lui une baisse de 5 % des nuitées estivales en 2025. Une tendance qui, selon les CCE, s’explique par le ralentissement du pouvoir d’achat des voyageurs européens et les tensions géopolitiques qui affectent la mobilité internationale.
Des secteurs qui se réinventent entre risques et opportunités
Si certains marchés se contractent, d’autres offrent des perspectives encourageantes. L’énergie figure parmi les secteurs en pleine mutation, portée par l’ambition régionale de devenir la première région à énergie positive d’ici 2050. « Les entreprises occitanes exportent de plus en plus leur savoir-faire en matière de gestion énergétique, de technologies vertes et de transition industrielle », a souligné David Elizalde. Cette évolution structurelle place la région sur la carte des territoires européens les plus dynamiques dans le domaine des énergies renouvelables.
Le numérique, autre pilier majeur, se positionne désormais comme le cinquième employeur régional. L’Occitanie a d’ailleurs envoyé 41 entreprises à VivaTech 2025, confirmant sa vitalité dans l’innovation technologique et la digitalisation des filières traditionnelles. L’intelligence artificielle, en particulier, s’impose comme un levier de compétitivité et de productivité. « L’IA n’est pas une menace, mais un outil pour renforcer la compétitivité de nos PME à l’international », a précisé le président des CCE Occitanie, qui voit dans ces solutions un atout stratégique pour l’exportation de services et la maîtrise des coûts.
L’agroalimentaire, confronté à des défis de rentabilité et de transition écologique, reste un secteur stratégique. L’amélioration de la qualité, la valorisation des labels régionaux et l’accès facilité à de nouveaux marchés via des accords de libre-échange — notamment avec le Canada, le Mexique ou le Japon — figurent parmi les leviers identifiés. « Les entreprises doivent mieux exploiter ces accords, souvent méconnus, qui permettent d’exporter sans droits de douane ou à des conditions préférentielles », a insisté David Elizalde.
Les CCE Occitanie : une expertise au service du territoire
En Occitanie, les CCE regroupent près de 100 dirigeants et experts issus de l’industrie, du numérique, du tourisme et de l’agroalimentaire. Tous sont bénévoles, nommés par décret du Premier ministre, et mettent leur expérience internationale au service des entreprises régionales. En 2025, ils ont accompagné une centaine d’entreprises dans leur stratégie export, tout en contribuant à l’accueil de délégations étrangères et à l’organisation d’événements internationaux sur le territoire.
« Nous sommes avant tout des dirigeants qui avons vécu les réalités de l’export. Notre rôle est de partager cette expérience, d’ouvrir nos réseaux et de soutenir les entrepreneurs dans leurs démarches », a rappelé David Elizalde.
Les CCE interviennent dans le cadre de missions de mentorat, de programmes de formation des jeunes aux métiers de l’international, et de conseil stratégique auprès des institutions publiques. Leur ancrage territorial, associé à une présence dans 150 pays, fait de ce réseau un maillon essentiel du rayonnement économique français à l’étranger.
L’Occitanie, avec sa structure AD'OCC, bénéficie également d’un maillage international renforcé, avec des « clubs export » thématiques et des bureaux de représentation régionaux à New York, Montréal et Tokyo. Ces dispositifs facilitent les échanges économiques et culturels, favorisant l’accès des PME régionales aux grands marchés mondiaux.
Les CCE jouent également un rôle clé dans la formation des jeunes. En partenariat avec des établissements d’enseignement supérieur et des écoles de commerce, ils interviennent pour sensibiliser les étudiants aux enjeux de l’international, les aider à bâtir leur premier réseau et les encourager à envisager une carrière à l’export.
« Nous sommes avant tout un réseau de dirigeants qui partagent leurs expériences et leurs échecs pour aider les autres à réussir », rappelait David Elizalde. « Notre ambition est de faire dialoguer le local et le global : accompagner les entreprises occitanes dans le monde tout en valorisant le savoir-faire régional à l’international. »
Cap sur 2026 : anticiper les mutations et renforcer la compétitivité
Pour les CCE, l’année 2026 s’annonce déterminante. L’objectif est clair : accompagner les entreprises régionales dans les mutations industrielles, numériques et environnementales qui redessinent les échanges internationaux. Les transitions énergétiques, la sécurisation des chaînes d’approvisionnement et la diversification géographique des marchés font partie des priorités.
« L’enjeu est de renforcer la capacité des entreprises occitanes à anticiper, plutôt qu’à subir, les transformations du commerce mondial », a insisté David Elizalde. L’émergence de nouvelles filières — défense, santé, industries culturelles et créatives — ouvre également des perspectives d’exportation prometteuses, appuyées par les contrats de filière régionaux et les investissements publics.
Selon les CCE, le tissu économique régional dispose des atouts nécessaires pour consolider sa place sur la scène internationale : une base industrielle solide, un vivier d’ingénieurs performant, et un écosystème d’innovation de haut niveau. Encore faut-il, comme le souligne David Elizalde, « savoir se projeter, s’entourer et tirer parti des dynamiques collectives ».
Un écosystème régional tourné vers le monde
Avec près de 9 000 entreprises exportatrices, l’Occitanie reste l’une des régions françaises les plus ouvertes sur le monde. Mais la concentration des exportations entre quelques grands acteurs laisse un potentiel important encore sous-exploité parmi les PME. « Sur ces 9 000 entreprises, 8 500 sont des petites structures qui réalisent moins de 10 % de leur chiffre d’affaires à l’international », a observé le président des CCE Occitanie.
Pour ces acteurs, l’enjeu n’est pas seulement de conquérir de nouveaux marchés, mais d’apprendre à les comprendre, à s’y adapter et à y durer. Les CCE se positionnent ainsi comme des facilitateurs, capables de relier les entreprises régionales à un réseau mondial d’expertise, de veille et d’opportunités. Malgré les incertitudes géopolitiques et économiques, l’Occitanie conserve un rôle stratégique dans le commerce extérieur français. « Notre mission, résume David Elizalde, c’est d’aider les entreprises occitanes à naviguer dans la complexité du monde, tout en restant ancrées dans leur territoire. »