Occitanie. Investissements, prêts, taux… Quelles perspectives bancaires pour 2023 ?

Quel paysage bancaire en 2023 et quels ont été les enseignements de l’année 2022 ? Sur ces sujets, Entreprises Occitanie a réuni autour de la table Cédric Calvez, délégué régional de la direction Occitanie Ouest de Bpifrance, François Bourgoin, DAF de Pastel Audition et commissaire aux comptes du Medef, et Xavier Pasche, directeur agence entreprises Haute-Garonne et Ariège au sein du CIC.

Le recrutement, les transitions et la trésorerie seront des sujets majeurs pour les dirigeants d'entreprise en Occitanie en 2023, selon nos experts. (Photo d'illustration : Fotolia)

Le recrutement, les transitions et la trésorerie seront des sujets majeurs pour les dirigeants d'entreprise en Occitanie en 2023, selon nos experts. (Photo d'illustration : Fotolia)

Nos trois experts ont répondu à l'invitation d'Entreprises Occitanie pour évoquer le bilan 2022 et les perspectives bancaires de 2023.

Quel bilan faites-vous, chacun, de l’année 2022 ?

Cédric Calvez : L’activité 2022 a été soutenue au niveau de Bpifrance, avec un déploiement financier important post-Covid pour soutenir le rebond. En début d’année, les trésoreries étaient bonnes grâce aux PGE, l’activité était dynamique sur tous les plans et les taux étaient historiquement bas. Au niveau des investissements, la mise en transition énergétique et la décarbonation des activités étaient au cœur des sujets adressés.

Nous accompagnons les entreprises dans toutes les phases de leur croissance. De nouveaux outils ont été déployés pour faire face aux enjeux de rebond de l’activité.

Xavier Pasche : L’année 2022 avait démarré sur une bonne dynamique dans le prolongement de 2021. Les indicateurs d’activité étaient au vert, les investissements robustes. La guerre en Ukraine a stoppé brutalement cet élan. Les entreprises ont dû faire face à la hausse du coût des matières premières, de l’énergie, l’allongement des délais de livraison et l’augmentation des taux d’intérêt. La confiance a laissé place à l’incertitude. Le niveau des trésoreries s’est tendu dans une période de démarrage de remboursement des PGE.

Puis au début du 2e semestre on a pu constater une reprise d’activité avec un rebond sur les investissements productifs mais aussi sur les opérations de croissances externes et de haut de bilan (cession, transmissions) marquées par la présence de plus en plus régulière de fonds d’investissement. Il est aussi important de noter que l’engagement RSE des entreprises est de plus en plus avéré. Les investissements liés aux enjeux environnementaux comme la décarbonation par exemple ont connu une forte croissance. La forte augmentation du coût de l’énergie a profité aux projets d’installation de panneaux photovoltaïques permettant de réduire à terme partiellement la dépendance énergétique. Nous accompagnons l’ensemble de ces projets. Sur ce sujet de la RSE, nous sommes tous concernés.

Cédric Calvez : La remontée des taux a été certes brutale mais elle n’a pas été un frein aux investissements. Les financements bancaires en France ont la spécificité d’apporter une garantie supplémentaire en étant fixes. La visibilité financière sur les projets est donc ainsi avérée. Dans le cadre de la reprise, nous avons déployé des garanties majorées sur les financements bancaires, ainsi que des prêts sans garanties sur des durées longues, afin que les entreprises continuent à investir malgré le contexte de crise et l’endettement important lié aux prêts garantis par l’Etat (PGE).

Cette tendance sur l’investissement et les croissances externes se confirme t-elle sur 2023 ?

Xavier Pasche : Il est encore trop tôt pour en être certain. Cependant, sur le démarrage 2023, les demandes sont toujours assez prononcées et notamment sur des opérations de croissances externes guidées par certaines filières (comme l’aéronautique) ou par la volonté d’atteindre une taille critique souvent avec une dimension internationale d’ailleurs. Les investissements « verts » sont toujours sur une belle dynamique financés avec prêts à taux bonifiés que nous proposons à nos clients.  L’investissement immobilier d’entreprise marque un peu le pas.

Cédric Calvez : Les outils de financement et de renforcement des fonds propres existent. Il faut les intégrer dans les projections financières pour consolider la faisabilité des projets. Les différentes maturités disponibles permettent de structurer les dettes afin d’accompagner les besoins des entreprises.

La forte inflation et la hausse des prix de l’énergie, conséquence notamment de la guerre en Ukraine, ont marqué notre quotidien. Quels sont ses impacts dans vos métiers ?

Xavier Pasche : L’impact est clair. Capacité à répercuter la hausse des prix d’achats, gestion des contrats d’énergie, recherche de nouveaux sourcings,…Ces sujets sont devenus incontournables. Ces nouveaux paramètres nous amènent à adapter notre analyse des dossiers, de façon plus détaillée. Certains comme les contrats d’énergie par exemple (échéance, impact…) n’étaient quasiment jamais abordés avec nos clients, ils deviennent incontournables pour l’analyse de certains secteurs d’activité.

François Bourgoin : Dans ce contexte, le banquier possède ce rôle de conseil important car il dispose d’une vision globale de l’activité économique sur son territoire, ainsi que des perspectives propres à chaque secteur.

Cédric Calvez : Le suivi des performances financières (et extra-financières) des entreprises est également important pour ne pas laisser une situation se dégrader. La répercussion de l’augmentation des coûts dans les prix de vente est inévitable.

Les différentes crises ont-elles des conséquences entre la banque et vos clients ?

Xavier Pasche : Sur le plan du risque, on constate une hausse des procédures collectives mais nous sortons de deux années durant lesquelles les tribunaux de commerce n’étaient que très peu sollicités (cf PGE). Les conséquences dans la relation clients sont positives. En étant encore plus proches et en ayant une meilleure connaissance de nos clients, nous offrons plus de réactivité, pouvons mieux anticiper les besoins et apporter les meilleures solutions. La proximité client est au cœur de notre démarche.

Cédric Calvez : Les différentes crises traversées ouvrent de nombreuses opportunités pour les entreprises. Nous faisons le constat de la nécessité de pouvoir accompagner la démarche stratégique des dirigeants sur des sujets clés : la gestion du BFR, la mise en transition énergétique et environnementale de l’entreprise... L'Ademe, par exemple, subventionne des missions Bpifrance tournées vers la décarbonation des activités et la gestion des flux de production.

Quel sera le sujet majeur en 2023 ?

François Bourgoin : Pour moi, le sujet numéro un, c’est le recrutement. Le partage de la valeur est un sujet qui va devenir crucial et d’ailleurs porté par le MEDEF.

Xavier Pasche : Avec le dividende sociétal, Crédit Mutuel Alliance Fédérale passe du discours à la preuve et est totalement dans cette notion de partage de valeur. En effet, 15% du RN du groupe (500 millions d'euros en 2023) sera versé au profit de projets écologiques et solidaires, c’est un engagement de deux milliards euros environ à horizon 2027. Le CICSO est filiale du groupe Crédit Mutuel Alliance Fédérale, premier groupe bancaire avec statut d’entreprise à mission. La RSE est au cœur de notre stratégie et nous devons accompagner et aider nos clients.

Effectivement, un dirigeant doit sécuriser ses hommes clés et arriver à garder ses salariés. Des formules existent déjà sous forme d’intéressement, PEE/PERCO... mais les solutions comme l’actionnariat salarié par exemple sont de plus en plus prisées. Il est vraiment très important que l’entreprise anticipe ces sujets.

Cédric Calvez : La mise en transition énergétique et environnementale de toutes les entreprises, ainsi que la souveraineté industrielle, seront les sujets majeurs de 2023. Des dispositifs existent pour accompagner les chefs d’entreprise sur ces sujets. Nous avons par exemple mis en place, avec l’ADEME, le Volontariat territorial en entreprise (VTE) « Vert », qui permet d’accompagner les entreprises dans leur recrutement sur des missions de transition énergétique et écologique avec une aide financière allant jusqu’à 8000 euros.

Le sujet « vert » irrigue tous les sujets. Les rapports extra financiers vont devenir obligatoires d’ici 2024/2025, il faut que les entreprises se préparent à gérer ces enjeux ».

Quelle stratégie adopter lorsque les entreprises sont endettées avec notamment les dispositifs de crise Covid ?

Xavier Pasche : L’endettement d’un groupe est un sujet analysé tous les ans. Pour 2023, les sociétés doivent sécuriser au maximum leur trésorerie et leur poste clients. C’est le nerf de la guerre. Les solutions de mobilisation du poste client existent et doivent être utilisées pour faire face à l’augmentation des BFR.

Cédric Calvez : Les sujets financiers se managent au sein d’une entreprise, y compris le bas de bilan. Le rôle des conseils est extrêmement important pour structurer la démarche.

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