Philippe Crespin : « le ruissellement n’a pas eu lieu »

Les trois cofondateurs de Simsoft Industry :  Leny Turmel, André Joly et Philippe Crespin.

Les trois cofondateurs de Simsoft Industry : Leny Turmel, André Joly et Philippe Crespin.

Chaque mois, nous proposons à un chef d’entreprise adhérent du Medef de commenter la situation économique. Codirigeant de la start-up Simsoft Industry, Philippe Crespin prend la plume pour expliquer les difficultés que vivent aujourd’hui les start-up de service digitale à l’industrie.

« Il est acté aujourd’hui que la numérisation des entreprises est un enjeu majeur de compétitivité et de productivité de notre économie. A ce titre, le plan de relance "Transition numérique" a prévu un volet ambitieux pour accompagner les entreprises industrielles dans leur transition numérique.

Bien que travaillant dans ce domaine critique largement financé par le gouvernement, mon entreprise est confrontée ces derniers mois à une avalanche de contrats retardés ou annulés de la part de grandes entreprises industrielles françaises de l’industrie manufacturière.

Une fois la déception digérée, mon analyse est que la crise sanitaire a mis en pleine lumière les freins structurels de ces entreprises qui retardent de façon dramatique la digitalisation de leurs moyens de production. Je veux parler là de la maltraitance de leur propre pôle innovation, du pouvoir démesuré de leur Direction des systèmes d’information (DSI) vis-à-vis des métiers et des structures achats inadaptées à une contractualisation « agile » avec les start-up.

Introduire une innovation de rupture dans de grandes entreprises demande une force de conviction, un relationnel, une expérience réelle de la production et des moyens financiers à la hauteur de l’inertie colossale de ces mammouths industriels. Or, nous sommes souvent confrontés à des jeunes diplômés en management de l’innovation (quand ce ne sont pas des alternants…), à des requêtes du genre : qu’est- ce que vous pouvez me proposer pour quelques milliers d’euros, à des responsables innovation tétanisés à l’idée de déranger la production, ou à des courses au retour sur Investissement stériles ; tout cela avant d’avoir expérimenté la moindre technologie sur le terrain. 

Toute sollicitation des métiers à une DSI même pour quelques heures est impossible, longue ou douloureuse… Quant aux services Achats, ils semblent redécouvrir à chaque fois les trois règles de base qui permettent à une start-up de survivre puis de se développer : démarrer un projet en étant couvert par une commande « accélérée », préserver sa propriété intellectuelle et être payée le plus rapidement possible de ces factures. 

Tout cela est à mettre en perspective avec la diligence des plans de relances du gouvernement supervisés par la BPI ou la remarquable réactivité de la région Occitanie quant à la contractualisation des lauréats sur ses différents appels à projets.    

Le « tout pour la production » actuel ne doit pas faire oublier que, ces deux dernières années et contrairement aux grandes entreprises industrielles françaises, d’autres pays européens, asiatiques ou nord-américain n’ont pas coupé leur effort d’innovation car ils ont compris depuis longtemps que leur compétitivité de demain dépend de leur innovation d’aujourd’hui."

 Des assistants vocaux pour l’industrie 4.0
La solution industrielle développée par Simsoft Industry est destinée à tous les opérateurs et techniciens qui réalisent des tâches guidées par des fiches d’instructions qui seront demain digitalisées et enrichies. Ils sont assistés par la voix et peuvent faire état de leur avancement ou poser des questions en interrogeant le service concerné oralement via une oreillette. Philippe Crespin est l’un des trois cofondateurs de l’entreprise aux côtés d’André Joly et Leny Turmel. Installée à Labège, la start-up de 22 salariés (CA non communiqué) a déjà convaincu des entreprises de l’automobile (Michelin, Continental), du bâtiment (groupe Bouygues), du nucléaire (Framatome, EDF), de l’industrie manufacturière (Vallourec, fabricant de tubes en acier) et du spatial (Thales Alenia Space). Les secteurs du militaire, du ferroviaire et de la grande distribution sont aussi dans sa ligne de mire.

 

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