Le Président de la République Emmanuel Macron a inauguré ce 12 novembre 2025, sur la base aérienne 101 de Toulouse, la “première capacité opérationnelle” du Commandement de l’Espace. Ce déplacement a également permis au chef de l’État de présenter la stratégie nationale spatiale, nouvelle architecture de référence pour l’ambition spatiale française et européenne, en amont de deux rendez-vous majeurs : la conférence ministérielle de l’Agence spatiale européenne (ESA) prévue fin novembre à Brême et le sommet spatial international que la France accueillera au printemps 2026.
Le Président de la République, Emmanuel Macron, lors de l’inauguration de la première capacité opérationnelle du Commandement de l’Espace. (Capture écran Youtube)
L’inauguration officielle du Commandement de l’Espace (CDE) constitue, selon le Président, une « étape décisive » dans la consolidation de la souveraineté nationale. Cette structure, désormais pleinement intégrée à Toulouse, concrétise les orientations posées par la stratégie spatiale de défense de 2019 et bénéficie de l’effort supplémentaire inscrit dans l’actualisation de la Loi de programmation militaire, qui consacre 4,2 milliards d’euros additionnels au spatial sur la période 2026-2030.
Emmanuel Macron a rappelé que l’espace est devenu un domaine de confrontation, évoquant les actes d’espionnage, de brouillage, d’attaques cyber ou encore les essais antisatellites menés par certaines puissances. Il a estimé que « des actions désinhibées fragilisent aujourd’hui un cadre qui, pendant des décennies, paraissait stable ». Ces évolutions justifient l’accélération des moyens militaires destinés à défendre les orbites stratégiques françaises. Les satellites patrouilleur-quêteurs Orbit Guard et Toutatis, annoncés pour 2027, illustrent cette montée en puissance, aux côtés de capacités d’action depuis le sol basées sur des technologies de laser et de brouillage, mises en œuvre « sans naïveté, mais dans le respect du droit international ».
Toulouse, épicentre opérationnel et scientifique de la nouvelle politique spatiale
Le choix de Toulouse s’inscrit dans la logique d’un rapprochement stratégique entre le CDE et le CNES, dont la présence permet une interaction constante entre innovation, recherche et opérations. Le Président a salué le rôle historique du CNES, soulignant que l’agence « a donné à la France sa place à la table des puissances spatiales ». La colocalisation avec le Centre d’excellence spatiale de l’OTAN, situé lui aussi à Toulouse, traduit la volonté de renforcer un continuum stratégique allant de la recherche amont jusqu’au déploiement opérationnel.
Selon Emmanuel Macron, cette alliance locale entre ingénieurs, industriels, militaires et chercheurs incarne la dimension duale du secteur spatial, devenu indispensable autant pour les communications et l’observation que pour la sécurité nationale.
Une stratégie articulée autour d’une vision longue, fondée sur cinq grands axes
La stratégie spatiale nationale dévoilée à Toulouse repose sur une architecture cohérente qui engage l’État pour les décennies à venir. Le Président a d’abord insisté sur la nécessité de préserver l’accès autonome à l’espace, qui dépend de la pérennité du Centre spatial guyanais, de la montée en puissance d’Ariane 6 et de la maîtrise des technologies qui structureront les futurs lanceurs, notamment celles liées à la réutilisation et à la propulsion à bas coût. La modernisation de la base de Kourou et l’ouverture à de nouveaux acteurs doivent permettre de renforcer encore cet accès indépendant.
Il a également souligné la nécessité de repenser le modèle industriel français pour renforcer sa compétitivité et sa cohérence. Cette transformation implique une meilleure articulation entre acteurs historiques et nouveaux entrants, ainsi qu’une politique des compétences ambitieuse à horizon 2040. Le Président a insisté sur l’importance d’un écosystème national soudé pour affronter une concurrence mondiale où les investissements, publics comme privés, s’accélèrent à un rythme inédit.
Le volet stratégique et militaire, déjà détaillé dans la première partie de son discours, s’inscrit dans cette même logique de continuité. Emmanuel Macron a rappelé que la guerre d’aujourd’hui se joue déjà dans l’espace, considérant ce domaine comme un continuum allant des couches basses de l’atmosphère jusqu’aux orbites les plus éloignées, dans lequel la France doit disposer de capacités complètes d’alerte, de réaction et d’action.
Le quatrième pilier concerne la science et l’exploration, que le chef de l’État a qualifiées de « sources de connaissance indispensables ». Il a évoqué les programmes liés au climat, au suivi de l’évolution de l’univers ou à la recherche de nouvelles ressources critiques, citant également l’importance des missions habitées. Il a salué l’engagement de Sophie Adenot, qui embarquera pour sa mission Epsilon sur l’ISS, ainsi que celui de Thomas Pesquet, dont il a rappelé l’impact symbolique sur la jeunesse française.
Enfin, la stratégie se déploie dans une volonté renouvelée de coopération européenne et internationale. Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité d’une Europe du spatial forte, unie et compétitive, estimant que la fragmentation actuelle nuit à la capacité européenne de rivaliser avec les grandes puissances. Selon lui, cette ambition nécessite à la fois une montée en gamme des champions industriels européens, une préférence assumée pour les technologies européennes et une gouvernance renforcée capable de piloter des programmes d’envergure comme IRIS².
Un engagement financier de grande ampleur pour soutenir l’ambition spatiale
L’État prévoit de consacrer plus de 16 milliards d’euros d’ici 2030 au spatial civil, un effort qualifié de « stratégique » et orienté vers les domaines duaux, les grands programmes internationaux et les initiatives européennes. Cette trajectoire s’articule avec les investissements militaires déjà annoncés et vise à structurer durablement la place de la France dans la compétition spatiale mondiale.
Le Président a annoncé l’organisation d’un sommet spatial international en avril 2026 à Paris, conduit avec l’Allemagne et plusieurs partenaires européens. Pour incarner cette ambition, Thomas Pesquet et Hélène Huby ont été nommés envoyés spéciaux, chargés de porter une vision commune pour l’Europe à l’horizon 2035.
En conclusion, Emmanuel Macron a rappelé que l’espace est devenu un enjeu central de souveraineté, un outil de stabilité internationale et un vecteur de progrès scientifique. Il a appelé les industriels, les militaires, les chercheurs et l’ensemble des acteurs de la filière à poursuivre leur engagement pour défendre, selon ses mots, « l’indépendance de la nation et une certaine idée du progrès humain ».